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Théâtre en déshérence*

Théâtre en déshérence* et artistes tziganes « disparus » victimes des crimes de guerre nazis ou de la terreur romaphobe des Etats pendant la 2ème Guerre  Mondiale

 Jusqu’ il y a peu, le chant, la musique, la danse mais aussi le cirque, le conte et le théâtre ont constitué les modes d’expressions privilégiés des communautés tsiganes. Pourtant leur parole se perd …. Les artistes qui en étaient les porteurs ont été évincés.  Pourtant ces communautés ont fortement contribué à la vitalité et à la survivance des patrimoines culturels et artistiques européens, et cela depuis plus d’un demi-millénaire.

 


                
Jusqu’ il y a peu, le chant, la musique, la danse mais aussi le cirque, le conte et le théâtre ont constitué les modes d’expressions privilégiés des communautés tsiganes. Pourtant leur parole se perd …. Les artistes qui en sont les porteurs ont été évincés.
 
                Jusque dans les années trente, les « troupes de Paris », ces compagnies itinérantes, sans aucun moyen, aux conceptions artistiques conventionnelles et qui proposaient un théâtre de piètre qualité, budget oblige, avaient le monopole du théâtre. Monopole qui les laissait la plupart du temps à peine survivre.                                 En réalité ces troupes ne venaient pas toutes de Paris. Beaucoup étaient simplement des compagnies tziganes ayant trouvé un argument commercial.
 
                 Mais à l’approche de la deuxième guerre mondiale, les lois anti-tziganes amorçaient déjà le processus d’éviction qui créa ensuite le « vide », notamment au niveau artistique. Cette éviction, qui aboutira au « Samudaripen », littéralement « la tuerie totale », qui eu lieu dans la plupart des pays d’Europe de 1933 à 1945 et au « Pohaïmos »(la dévoration). Il s’agit du  génocide perpétré par les nazi et leurs collaborateurs mais aussi par les polices normales des états avant même l’occupation, contre les communautés tsiganes. Le Pohaïmos eu lieu à travers la logique concentrationnaire, mais aussi et surtout par le crime par balle partout où les familles tsiganes se trouvaient.
Le mouvement de renouveau théâtral émergeant à la Libération, trouva la place vide, ainsi qu’un public longtemps privé et qui reprenait possession des lieux d’expression.
« Enfin », le théâtre se nationalise : appel à projet est fait. Cela fait partie, après les années d’occupation, du mouvement de réappropriation nationale, né de la Résistance dont les frères Huisman seront les figures emblématiques à la tête du nouveau « Théâtre National ».
C’est alors l’époque où tout est « nouveau », « révolutionnaire » et « issu de la résistance », beaux arguments d’autorités pour ceux qui viennent remplacer le vieux théâtre qu’ils nomment,  pour l’amoindrir encore, « bourgeois », alors qu’il eu fallu le nommer « de misère » et « « en guenilles».
Des productions de qualité arrivent, un théâtre de metteur en scène apparaît, de jeunes talents prometteurs seront mis en évidence, les « Nouvelles compagnies théâtrales » feront leur apparition et bénéficieront en outre, condition sine qua non, d’un nouveau mode de financement : la subvention. Le Théâtre Belge a pris un tournant décisif…
 
Que dire de plus ?… Si ce n’est : Qui pense alors à ceux qui ont « disparu » ?
   Il en fut  de même pour la fête foraine, où l’on ne trouve plus guère les familles d’autrefois. D’autres les remplacent aujourd’hui.                                                                Mais que sont devenus les manèges, les moulins, les caravanes, les voitures et  camions, bref les richesses de ces industriels forains disparus?

                Par la suite, dans les années 80, les familles d’artistes tsiganes vont être à nouveau supplantées, cette fois dans le domaine du cirque. L’apparition du « nouveau cirque » et des subventions pour le cirque et les arts de la rue, simultanément à la politique anti-tzigane très dure qui sévit dans toute l’Europe de l’ouest depuis la fin de guerre : refus de nationalité, interdiction de stationner, refoulement aux frontières, interventions de police, …, auront eu raison des derniers cirques tziganes.
                Il en va de même aujourd’hui pour la musique tzigane.
Nous assistons maintenant au remplacement des tziganes dans leur propre musique.
 
                D’un point de vue éthique, deux questions s’imposent : primo, quid de la survivance économique et culturelle des communautés Roms/Sintis ? Secundo, quid de la transmission de leur parole ?
 
                 L’urgence immédiate est de redonner une place non marginale à ces communautés qui ont contribué fortement à la vitalité et à la survivance des patrimoines culturels et artistiques européens, et cela depuis plus d’un demi-millénaire.

 
*Le concept de déshérence est repris à Jean Ziegler dans son livre « la Suisse, l’or et les morts » ( cliquez ici). Il démontre dans ce livre que les banquiers suisses ont apporté les financements nécessaires à Hitler pour continuer la guerre. Et aussi comment ces même banquiers ont recelé et « lavé » l’argent volé par les nazis  à leurs victimes génocidées dans les camps d’extermination. Dans le même temps la Suisse refoulait à ses frontières les réfugiés juifs, les livrants à leurs bourreaux nazis.
Les victimes des camps d’extermination nazis, génocidées, n’ont pu réclamer leur argent.  Leurs comptes en banque  ont continué d’exister et de fructifier, en déshérence, enrichissant les banques suisses… 
Maude Aïda COLS
COPY RIGHT N°1807